Un dimanche banal. Un dimanche comme il les apprécie. Se faire réveiller par des baisers et des caresses. Déjeuner dans la cuisine en discutant de tout et de rien. Effrayer le chat juste pour le plaisir. Prendre une douche à deux. Routine qu'il aime tant, ne se lassant jamais. Et même si parfois le silence de la maison semble pesant, que les rires et les cris des enfants lui manquent, pour rien au monde il n'échangerait ces dimanche-là. Parce qu'ils sont à eux. Ils ne font jamais grand chose, se contentant de trainer dans la maison ou le petit jardin, Vincent écoutant Marcus lui lire un de ses innombrables livres en somnolant. Ou bricoler pour réparer deux, trois choses. Ou juste flemmarder en zonant sur internet. Un vieux jogging et une veste sur le dos, il s'empare de la laisse de Nelson, leur vieux chien, une créature coupée mastiff/poney, récupéré y'a déjà plusieurs années dans un refuge. Le gros pépère traine des pattes jusqu'à la porte d'entrée, laissant son habituelle trace de bave derrière lui. Il accroche la laisse autour du collier, récoltant un coup de museau humide. Il l'abandonne dans l'entrée, regagnant le salon en enfilant des baskets. Marcus est dans son coin bibliothèque, feuilletant un bouquin, assis dans son fauteuil préféré. Vincent glisse une main dans les cheveux grisonnant dont il ne se lasse pas de la texture, appréciant leur douceur - et leur odeur quand il y plonge son visage. « Je sors Nelson. » Sa voix résonne dans le silence ambiant obligeant son mari à quitter ses lignes pour le regarder. Il se penche sur le fauteuil déposant un baiser sur ses lèvres. Un sourire. Sortir le chien se fait soudainement moins intéressant. Il resterait bien dans le coin à dévorer la bouche de celui qu'il a épousé et fait sien, se laissant emporter dans leur baiser. Il y met pourtant fin avant de déraper, déposant un baiser léger sur la joue mal rasée, Nelson se faisant entendre d'un aboiement grave. « Je me dépêche. » Un sourire en coin et une dernière caresse dans les cheveux, il s'éclipse, récupérant la laisse et le chien. Il fait un peu frais et il regrette de ne pas avoir emporté une écharpe, s'enfonçant dans le col de sa veste chaude. Le chien gambade de sa démarche lourde devant lui, reniflant chaque poteau et l'obligeant à s'arrêter tous les trois mètres pour l'attendre. Dix minutes. Puis vingt. Puis trente. Une heure passe rapidement quand il revient dans leur rue, devant le porche de leur maison de ville. Il s'engouffre dans l'entrée, appréciant la chaleur environnante et se débarrasse de sa veste froide. Une fois lâché, Nelson s'éclipse, probablement parti pour dormir toute la journée. Il retire ses baskets, les rangeant soigneusement dans le placard. Marcus est encore dans le salon mais cette fois-ci sur le canapé. Une boite poussiéreuse trône à ses pieds et d'innombrables photos jonchent la table basse et le tapis duveteux. Il se laisse tomber à ses côtés, ses yeux parcourant les clichés. « C'est quoi tout ça ? » Il n'a jamais été sentimental et ne le sera probablement jamais. Et pour une raison qui lui échappe Marcus a toujours aimé toutes ces vieilleries - comme l'atteste la Mustang garée dans la rue devant chez eux. Ses doigts glissent sur quelques photos et s'arrêtent sur l'une d'entre elle. On y voit Roxane encore bébé, toute petite entre les bras de Marcus, Vincent penché sur tous les deux. Il retourne le cliché, 1993 - first time. Un petit sourire nostalgique étire ses lèvres. « Elle était toute petite. » Il reconnait les murs de l'hôpital et se rappelle encore de l'angoisse à attendre qu'on la leur remette. L'angoisse que la jeune mère change d'avis et brise leur rêve. Leur famille. Il se souvient aussi du profond soulagement quand l'infirmière est entrée avec le bébé et de l'amour qu'il a ressenti en posant ses yeux sur elle. Du moment exact où il est tombé amoureux de leur fille.
depuis que les enfants ont tous prit leur envol, la maison est calme, et certains jours n'appartiennent qu'à vous deux, avec vincent. le week-end en général, quand vous avez un peu plus de temps pour le passer dans les bras l'un de l'autre, emmitouflé et enchevêtré sous un plaid, sur le canapé, à regarder un film. mais ce que tu préfères, de ces deux petits jours, ça reste le dimanche. jour sacré ou vous ne faites pour ainsi dire rien de la journée. ce matin, tu as été le premier réveillé, la faute aux rayons du soleil filtrant à travers les volets mal fermés de votre chambre. en même temps, en hiver, à montréal, c'est rare que l'astre luise à ce point. et ça t'as échappé un grognement de protestation, parce que t'aurais pas dit non à une ou deux heures de sommeil supplémentaires. mais, quitte à être réveillé, tu as préféré te lever en douce, frissonnant en quittant les draps, l'air ambiant venant s'écraser contre ton corps nu. (pourquoi s'emmerder avec des vêtements la nuit ?) t'as traversé la maison, bien conscient de n'y croiser personne hormis peut-être le chien ou le chat. les deux mammifères ont d'ailleurs eu l'oreille fine en t'entendant et se sont visiblement mis d'accord pour venir se frotter dans tes jambes. tu remplis rapidement les gamelles avant d'attraper ton appareil photo traînant sur le plan de travail, objet que tu étais venu chercher, de base. ça a toujours été irrationnel, cette envie de prendre vincent en photo. tout le temps, partout, dans n'importe quelle situation. et le voir encore endormis, dans vos draps. t'as pas résisté. d'autant plus que la luminosité te laisse tout le loisir de prendre de magnifiques clichés. ceux qu'il découvrira s'il a la curiosité de lire la carte mémoire de l'appareil, mais le connaissant ça n'arrivera pas. il se contentera de remarquer que ce dernier à changer de place. et se douter de ton petit manège. et puis tu as craqué, tes doigts glissant sporadiquement contre son épiderme, un sourire sur le coin des lèvres, bientôt accompagnés de doux baisers. et ce matin, avant que vincent ne se réveille, tu n'as que le temps de descendre tes mains au niveau de son pubis, après avoir redessiné la saillie de son bassin. putain de V, tu sais pas comment il fait. bonjour mon amour. tu murmures en le sentant bouger contre toi, te redressant un peu. ce sera pour un autre jour, le réveil à coup de fellation. bah ouais, il avait cas dormir dix minutes de plus. tu souris contre ses lèvres à ces pensées. si seulement il savait ce qu'il vient de louper. plus tard dans la journée. peut-être. (sans doute.)
la matinée s'est déroulée tranquillement, et après une douche à deux et un petit-déjeuner, tu as décidé de t'installer dans le salon, un bouquin entre les mains, te plongeant rapidement dans le récit. ce n'est que lorsque vincent s'approcher et que sa voix résonne, que tu te détaches du texte. je sors nelson. tu hoches la tête, un sourire sur les lèvres, un sourire contre ses lèvres au travers de son baiser. tu soupires d'aise, le prolongerais avec plaisir, mais ton compagnon te devance en s'éloignant à peine, déposant un baiser sur ta joue mal rasée. t'as sans doute un sourire idiot sur les lèvres. je me dépêche. tu ris un peu en entendant le chien aboyer, semblant impatient. et t'es persuader que vincent va encore louvoyer et la promenade durer une bonne heure. comme d'habitude. et comme à son habitude, le chat, confortablement installé sur tes jambes, émet un miaulement, puisque tu as arrêté de le caresser depuis trop de temps à son goût. un léger soupir t'échappe et malgré les protestations de l'animal, tu viens le poser à ta place sur le fauteuil, rangeant le livre, attrapant ton paquet de clopes en t'approchant de la fenêtre. tu glisses un tube entre tes lèvres, et tu sais. tu sais que la nicotine est néfaste, délétère pour ta santé. mais tu fumes depuis trop longtemps que pour arrêter en un claquement de doigt. c'est la première de la journée, c'est déjà ça.
une fois ta cigarette fumée et tes mains lavées de l'odeur de fumée, tu te décides à grimper les escaliers jusqu'au grenier, avec une soudaine envie d'en descendre une boite poussiéreuse et remplie de photos. t'aimes ça, les souvenirs, ancrés dans du papiers glacés. tu regagnes le salon, prenant directement place sur le tapis duveteux, commençant à étaler les clichés sur la table basse et tout autour de toi. t'es un sentimental, vincent te le rappelle bien trop souvent. et en parlant de ton mari, tu l'entends rentrer et le chien vient chercher une caresse avant d'aller se laisser tomber dans son panier, partant pour une longue sieste. tu relèves la tête vers l'horloge. une heure de plus que tout à l'heure. gagné. c'est quoi tout ça ? tu esquisses un sourire, tournant la tête vers vincent, maintenant installé près de toi, et récupérant une photo. tu l'observes longuement, un sourire sur les lèvres. roxane, toute bébé. votre bébé. elle était toute petite. et déjà si belle. tu souffles avec un sourire tendrement, te penchant pour venir déposer un baiser sur la joue encore fraîche de vincent. elle l'était. si petite dans tes bras, déjà si magnifique dans tes yeux. tu attrapes une autre photo, un peu plus vieille. 1995 - happy bday. deux ans déjà, la petite. tu tournes la tête vers vincent, et tu viens t'appuyer contre son épaule. ça te manque parfois. l'agitation de la maison. les cris, les pleurs, les rires. et pourtant tu chéri ce silence également. tu fermes les yeux un instant. tu n'aurais pu imaginer plus belle vie de famille. je t'aime. que tu souffles, te sentant d'humeur tendre et amoureuse. amoureux comme au premier jour.
Il est assis au milieu des photographies, rêveur. C'est bien son genre de s'extasier sur le passé et Vincent est même surpris qu'une seule boite ait été descendue. Le connaissant, il se serait attendu à cinq ou six, envahissant le salon, mettant à rude épreuve sa légère maniaquerie, passant toute la journée à fouiller dans les vieilleries en se remémorant de beaux souvenirs - ou parfois mauvais. Il râle souvent quand Marcus sort son appareil et le mitraille sous tous les angles, figeant son image, figeant le moment. Mais au fond, avoir toutes ces traces de leur passé a quelque chose de touchant, de rassurant. Et il sait que les enfants apprécient pouvoir s'y plonger eux aussi, écoutant parfois les récits d'évènements qu'ils ont oublié ou trop petits pour s'en souvenir. La photo de Roxy si petite ravive énormément de choses, le rendant presque sentimentale - il ne l'avouera jamais. Lui aussi aime se plonger dans ces boites aux côtés de son mari, doux moment partagé à deux. Toute leur vie tient dans une dizaine (peut-être vingt, ça fait un moment qu'il n'est pas monté là-haut) de cartons. Et déjà si belle. Il sourit à Marcus qui dépose un baiser sur sa joue fraîche. Le contraste du froid mordant de l'extérieur et des lèvres chaudes de son époux a quelque chose de surprenant, lui arrachant mille frissons. Il repose le cliché sur la table, se mélangeant aux autres. Marcus en attrape un autre montrant une Roxy un peu plus âgé au sourire immense. Elle a toujours été si lumineuse. Petit rayon de soleil dans leur vie. Marcus vient s'appuyer contre lui, partageant sa chaleur. Vincent passe un bras autour de ses épaules, le serrant un peu plus, souriant à son murmure, son coeur s'emplissant du même sentiment. Trente et un ans et ils s'aiment toujours autant. On lui demande parfois comment il fait. Il répond toujours que c'est le shifumi la clé d'une relation saine. Mais ce serait mentir de dire qu'ils sont toujours heureux, toujours sur la même longueur d'onde. Il se souvient de grosses disputes, de mots difficiles, de regrets et de rancœur. De plusieurs jours à ne pas s'adresser la parole, par fierté. Il se souvient aussi des réconcilions qui suivaient, appréciant ces moments. Je t'aime aussi. Il embrasse la tempe de son mari, inspirant l'odeur de ses cheveux qu'il affectionne tant - lui volant parfois son shampoing pour avoir son odeur au bureau toute la journée. Il finit par se décoller un peu, se penchant sur les autres photographies, souriant en tirant un autre cliché. Des adolescents boudeurs alignés sur un muret, probablement en train de râler contre l'oppression parental. Parce qu'il est aussi présent sur la photo, légèrement de dos, semblant mécontent. Tu sais ce qui est le plus triste dans tout ça ? Il se détourne des photos pour fixer Marcus. Il n'a pas changé en trente ans et il a tellement changé à la fois. Il est le même, plus vieux, plus mâture, toujours aussi beau. Des cheveux gris, des petites rides parsemant son visage, une lueur au fond du regard qu'il n'avait pas avant. Peut-être cette fameuse sagesse que l'on acquiert au fil des années et des expériences ? Celle qui murmure je sais beaucoup de choses. C'est que tu es rarement sur les photos. Peut-être devrais-je m'y mettre ? Pour l'immortaliser lui aussi et remplir des cartons de photos, de son visage. Il y est parfois sur les clichés mais rarement, plus souvent derrière l'objectif que devant. Sa petite passion. Il se rapproche légèrement de Marcus, sourire railleur. Bêtise aux bords des lèvres comme si souvent - deux grands enfants. Je me ferai un petit album porno. Il rit doucement, faisant référence aux innombrables photos de lui nu qui doivent trainer quelque part, cachées à la vue des enfants. Lui, dans le lit. Sous la douche. Dans le dressing. Traversant la chambre. Et bien d'autres situations. Des moments d'intimité pure capturés par Marcus. Il embrasse son mari, ses mains froides glissant sous le pull, se faufilant sur la peau chaude, appréciant les courbes maintes fois parcourues qu'il connait sur le bout des doigts. Peut-être que je te demanderai quelques conseils. Son murmure se perd contre les lèvres de l'autre, avalé par son souffle. Il rit pourtant contre lui, déposant une myriade de baiser dans son cou, le serrant un peu plus contre lui, se réchauffant à son contact, appréciant leur proximité. Un des avantages à ne plus avoir les enfants dans le coin, pouvoir se tripoter n'importe où et n'importe quand sans se faire surprendre par une paire de yeux horrifiés.
toutes ces années immortalisées sur du papier glacé, tu ne les as pas vues passer. sans doute parce que tu les as vécues un peu trop intensément, simplement parce qu'elles sont arrivées aussi vite qu'elles étaient déjà passées. trente ans. trente ans que tu partages ta vie avec vincent et bon sang, tu as l'impression que c'était hier, le jour ou il a embouti ta mustang, en plein hiver, avant de te frapper. et tu as l'impression que c'était hier aussi, cette première nuit partagée à ses côtés. le temps passe trop vite. et maintenant vous avez cinq grands enfants, une petite fille, vous êtes mariés et vous êtes vieux. toutes ces photos, c'est votre parcours à vous, jaugé de vos emmerdes et de vos embûches. parce qu'il y en a eu. et tu y pensais tout à l'heure en étant tombé sur une photo datant d'une bonne vingtaine d'années - sans doute vingt-cinq - prise par tu ne sais trop quel inconnu, de vous, arborant fièrement un drapeau arc-en-ciel tendu entre vos mains, échangeant un baiser. il y en a eu du chemin depuis. il y en a eu des prides, des manifestations, des débats houleux avec des ignorants, des homophobes, des connards. et finalement, finalement vous avez bien fait de ne pas les écouter, tout ceux qui vous disait d'arrêter vos conneries et de vous trouver de belles petites femmes pour fonder une famille. ça, vous l'avez fait ensemble.
tu t'appuies contre vincent, son bras autour de tes épaules et un souffle contre tes lèvres. mots qu'il est si facile de souffler, mais qui sont encore si significatifs. tu fermes les yeux un instant, un bref instant qui semble pourtant durer une éternité. je t'aime aussi. sourire au bord des lèvres, en sentant celles de ton mari contre ta tempe. tu te redresses un peu, finalement, le laissant se pencher pour attraper une autre photographie. votre petite bande alignée de force sur un muret, julian les bras croisés et claire soufflant fortement. sans compter vincent de dos, sans doute en train de les engueuler. tu pourrais presque imaginer la scène. un rire t'échappe doucement. tu sais ce qui est le plus triste dans tout ça ? tu relèves la tête, ton regard glissant dans celui de vincent, et tu te pinces brièvement les lèvres. que ta belle gueule soit pas sur la photo avec les enfants ? tu demandes avec un sourire en coin, haussant les épaules l'air de rien. t'en as sans doute bien assez des photos de ton compagnon. et tu le sais. mais tu ne peux t'empêcher de le capturer sous tout les angles possibles. même les plus affreux au détour d'un cliché soigneusement conservé dans ton téléphone portable. ce n'est pas ce qui te préoccupe le plus pour le moment. mais plutôt l'idée de te perdre dans ses prunelles bleues. encore et toujours, sans jamais t'en lasser. depuis trente ans que t'y plonge et que tu t'y perds. c'est que tu es rarement sur les photos. peut-être devrais-je m'y mettre ? tu arques un sourcil à ses mots, haussant les épaules un peu trop innocemment. sans doute, oui. tu souffles ensuite, avec un sourire tendre sur les lèvres. c'est ton truc la photo. mais borde, qu'est-ce que t'aimerais le voir s'y mettre. tu observes vincent de longues secondes, sentant la connerie arriver bien trop rapidement, rien qu'au sourire sur ses lèvres. je me ferai un petit album porno. tu ne peux t'empêcher de pouffer de rire, secouant un peu la tête. évidemment qu'il sait, que t'as des milliers de clichés de lui nu, depuis tout ce temps. je ne vois pas de quoi tu parles. tu murmures contre ses lèvres, fermant les yeux et glissant tes mains dans ses mèches, appréciant leur texture entre tes doigts. leur douceur, aussi. tu soupires faiblement d'aise, avant de sursauter en sentant les mains gelées glisser contre ta peau. putain. tu souffles entre tes dents, t'habituant peu à peu à la sensation.
peut-être que je te demanderai quelques conseils. tu ris contre ses lèvres, une main continuant de jouer avec ses mèches, la seconde venant trouver chemin contre le torse de vincent, remontant dans son dos pour l'attirer un peu plus contre toi. les plus belles photos, c'est celles qui sont naturelles. tu murmures. un instant volé, pris au dépourvu, sans que personne ne s'y attende. t'as beau dire qu'il est beau vincent, quand il accepte de poser une photo ou deux (il est beau. tout le temps.) les photos que tu préfères, ce sont toujours celles volées, presque floues. les plus belles. sinon, au lieu de te lancer dans un album porno. tu ajoutes, presque trop pensif pour la situation. tu peux juste profiter de ton modèle. tu ris, revenant capturer ses lèvres, ne t'en lassais jamais. ta seconde main rejoins la première sous son haut. et les deux viennent se faire plus taquinent en se frayant un chemin dans son pantalon, contre ses fesses.
Se murmurer des mots doux n'a jamais perdu en intensité. Glisser un je t'aime au creux d'une oreille, recevoir une réponse, c'est juste ce qui leur faut. Un bref baiser rempli d'amour et de tendresse. Une main dans les cheveux. Autant de petits gestes et de rien du tout qui veulent dire tant de choses. Une routine qu'ils aiment et dont ils ne se lassent pas. Quand le dernier des enfants est parti, l'adaptation a été rude. Le silence angoissant. Juste eux deux terrifiant. Puis ils se sont redécouverts. Nouvelle jeunesse stupide. Se faire des blagues. Courir à travers la maison. Se battre à coup d'oreillers. Faire l'amour un peu partout. Il rit de ses blagues, de leur complicité évidente. Il rit quand Marcus s'offusque des mains bien trop froides sur sa peau chaude, Vincent accentuant le toucher, juste pour l'embêter - et caresser un peu. Bien sûr qu'il sait pour les photos volées. Bien sûr qu'il a parfois senti les draps glisser et entendu le bruit d'un clic d'appareil photo, les doigts de Marcus glissant sur sa peau, dessinant des arabesques imaginaires. Il a laissé faire, dès les premiers instants, trouvant l'idée excitante et touchante. Il est parfois tombé sur des clichés abandonnés, jetant un oeil sur les petits trésors. S'il n'était pas si égoïste, il pousserait Marcus à les partager, parce qu'ils sont beaux, parce qu'il y a quelque chose dans sa façon de capturer ses petits instants. Les photographies trouveraient sûrement leur place dans une galerie, une petite exposition. Mais Vincent, il est trop égoïste pour partager ça avec le monde, voulant garder son Marcus et sa petite manie pour lui. Ne voulant pas que d'autres voient ce que son mari fait. Marcus glisse ses doigts dans ses cheveux, jouant avec des mèches quelque peu indisciplinées. Une caresse douce, enivrante qui descend sur son dos, le poussant à se rapprocher. Les plus belles photos, c'est celles qui sont naturelles. Un sourire étire les lèvres de Vincent, yeux pétillants. Il est tellement passionné par la photographie. Tellement amoureux de ses clichés. Tout ce bordel qui s'entasse dans le grenier dans des boites, rendant l'accès de plus en plus difficile - et mettant à mal son besoin excessif de rangement parfait. Point sur lequel ils sont souvent en discorde, Vincent passant derrière Marcus pour ranger, pour replacer un livre, pour aligner des pots - toujours en râlant. Le rire de Marcus trouve écho chez lui, sa remarque stupide se frayant un chemin entre eux. Mais j'y tiens à mon petit album porno. Juste pour qu'il puisse lui aussi feuilleter dans son coin, le planquer dans ses affaires. Mais ses plaintes sont coupées par un autre baiser, se perdant dans l'échange. Les mains de Marcus se font bien plus entreprenantes, glissant sous le jogging, aventureuses et taquines. Un sourire étire les lèvres de Vincent, sa peau se parsemant de milles et un frisson. Il se décolle brièvement, juste pour pouvoir se rapprocher d'avantage, se glissant sur les cuisses de son mari. Le baiser reste étrangement paresseux, étrangement excitant. Y'a pas le rush des premières fois quand ils étaient si jeunes. Jeu langoureux à celui qui pliera le premier. Ses doigts se perdent dans les cheveux doux, fourrageant avec tendresse puis s'agrippant avec un peu plus de poigne. Il tire sur les mèches, brisant le baiser. Est-ce que je peux te rappeler que le canapé est presque neuf ? Ses yeux quittent momentanément le visage de son mari pour accrocher une tâche sur le tissus. Vestige de sa demande en mariage, porc au caramel renversé sous le coup de l'émotion, tâchant le meuble à peine arrivé dans leur demeure. Il revient sur le visage de Marcus, regard inquisiteur, tirant un peu plus sur les cheveux. Pas de tâche. Ce n'est pas une question, peut-être une menace. Peut-être. Il embrasse les lèvres offertes, bougeant sur les cuisses, accentuant le frottement entre leurs deux corps, ses mains lâchent les cheveux grisonnant pour glisser vers le bas du pull de l'autre. Elles s'y glissent, tirant sur le doux tissus pour le déloger et le remonter un peu, dévoilant une peau mainte fois embrassée et parcourue.
tu pourrais passer des heures, des journées entières, dans les bras de vincent. juste comme ça, à ne rien faire de productif. regarder un film, somnoler, lire quelques chapitres de ce roman que vous avez entamés à deux (ou qui a été entamé avec le brun logé contre toi et qui se continue comme ça à chaque fois.) à voix haute ou bien vous plonger dans quelques photographies. c'est plus ton truc, mais t'es persuadé que derrière ces airs de j'm'en fous, il aime aussi s'y perdre. tes doigts glissent sur les photos. tu aimes pouvoir les tenir entre tes doigts, même des photos récentes, même celles de votre mariage. elles pourraient être conservées sur téléphone ou sur ordinateur, mais ça n'a pas le même charme. t'es un vieux. tu préfères le papier.
tu frissonnes en sentant les mains encore glacées de vincent glisser sous ton pull, à même ta peau, et un juron t'échappe. ça aussi, c'est un avantage. plus besoin de surveiller son langage devant les gosses pour donner l'exemple. p'tit con. tu souffles quand il appuie un peu plus ses paumes glacées contre tes cotes. mais les caresses sont trop agréables pour que tu lui en veuilles réellement. pour preuve, t'es déjà en train de fourrager ses mèches grisonnantes, tes doigts serrant ces dernières distraitement, sporadiquement. ça a un côté apaisant, quand tu y penses. tes mains dérivent, dévalent son dos, glissant sous son haut, à même cette peau chaude et encore douce sous tes doigts. tu connais chaque centimètre carré d'épiderme par cœur. et si tu étais un peu plus doué en dessin, tu serais sans doute capable de transposer chaque détail, chaque grain de beauté sur le papier. mais j'y tiens à mon petit album porno. tu l'observes de longues secondes, un air faussement outré sur le visage, avant de rire, et de revenir capturer ses lèvres. fais donc. tu murmures contre sa bouche, souriant malgré tout, tes mains continuant leur descente contre son corps, franchissant à présent l'élastique du jogging. sourire complice au bord des lèvres quand tu le sens frisonner contre toi. et putain, c'est vraiment irrationnel, tout ce qu'il se passe dans ton esprit. c'est irrationnel la manière dont tu l'aimes toujours aussi fort qu'il y a trente piges. si fort.
tes mains confortablement installées contre ton mari, tu le laisses se détacher un peu, juste le temps de grimper sur tes cuisses. ta prise se renforce contre ses fesses, et tu l'attires à toi, soupirant d'aise contre ses lippes, ta langue glissant presque paresseusement à la rencontre de la sienne. tes mains remontent caresser le bas de son dos, retrouvant leur place rapidement, tandis que les doigts de vincent ont récupérés leurs places dans tes mèches de cheveux, pression qui t'obliges à te détacher de ses lèvres quand il tire un peu dessus. est-ce que je peux te rappeler que le canapé est presque neuf ? un rire t'échappe, tu suis le regard de ton compagnon, sur la tâche déjà présente sur le tissu. ça, c'est de ta faute. tu te contentes de souffler, un rire sur les lippes. entièrement de sa faute. il n'avait qu'à attendre que tu termines ta bouchée, au lieu de te demander de l'épouser un peu au hasard, entre deux conversations totalement banales et même ennuyantes. il tire un peu plus sur tes mèches, et tu penches un peu la tête en arrière pour compenser cette sensation. pas de tâche. sourire taquin sur les lippes, tandis que vous échangez un nouveau baiser. et que ce con trouve sans doute ça amusant de venir bouger sur, et contre toi. délicieusement excitant. tu profites de ses mouvements pour tirer le jogging sous ses cuisses, relevant la tête, l'air de rien. comme si c'était mon genre de faire des tâches. tu souffles après l'avoir aidé à retirer ton pull. ou peut-être le sien. tu sais plus à qui il a appartenu, avec toutes ces années. rappelle moi qui a tout recraché à côté la première fois qu'il a fait une fellation à l'autre, hm ? tu ne peux t'empêcher d'ajouter, riant un peu, glissant tes mains contre sa taille, en profitant pour tirer sur son haut, dévoilant son torse que tu viens détailler sans vergogne. c'est ton mari après tout. t'as l'droit de le mater ouvertement. t'es le seul à avoir le droit.
Les premiers temps avaient été difficiles. Se retrouver juste tous les deux était étrange. Ça faisait bien longtemps que la maison croulait sous les rires et les cris. Puis ils avaient commencé à partir, chacun leur tour, quittant la maison pour de nouveaux horizons. Et l'angoisse était arrivée avec, l'obligeant à surveiller ses rejetons via les réseaux sociaux, parce que les appeler n'était pas une option (il serait probablement passé pour le type trop chiant). Puis ils s'étaient tous les deux habitués, une nouvelle routine, une nouvelle façon de vivre. Au final, ils ont gagné une liberté qu'ils n'avaient plus et une maison peut-être un peu trop grande pour deux - et les animaux. Une liberté qui leur permet de se retrouver assis sur le canapé, tous les deux, le bordel de Marcus étalé un peu partout, leurs bouches collées l'une contre l'autre, sans l’appréhension d'être découvert par l'un des enfants. Ses mains se baladent, aventureuses, curieuses. Elles connaissent chaque parcelle de peau, savent où aller pour embêter - ou exciter. Il ne se lasse pas de l'autre, le désirant comme aux premiers jours, ne perdant pas une once de désir ou d'envie. Vivre sans Marcus ne semble plus être une option rien qu'envisageable. Parfois il se demande ce qu'il serait devenu s'il n'avait pas embouti la Mustang, trente ans plus tôt. Sûrement malheureux. Assis sur ses cuisses, la remarque sur le canapé quasi-neuf ne semble pas atteindre l'autre qui se contente de rire ouvertement lui arrachant une myriade de papillons dans le ventre. Il sourit au souvenir de sa demande en mariage, de Marcus s'étouffant avec sa bouchée. Que de romantisme.
tu ne penses pas que ce soit une utopie, ou même que ça puisse être chimérique, cette relation avec vincent. bien meilleure encore qu'une métaphore de la relation parfaite. c'est la relation parfaite. celle qui dure à travers les années. vincent, c'est ton meilleur ami, ton confident, le père de tes enfants, ton amant, ton époux. tout ça à la fois et bien plus encore. c'est devenu vital que d'être à ses côtés. vous auriez sans doute votre place dans un poème bucolique des années deux mille dix. elles sont passées trop rapidement ces années. ou sont vos vingt-ans ? bordel.
Les petits piques et remarques font partie intégrante de leur vie commune. Titiller l'autre, se moquer, le taquiner, routine dans laquelle ils semblent être experts. Ça fait bien longtemps que Vincent ne se vexe plus, conscient que les mots sortant de cette bouche ne sont que taquineries. Taquineries dont il se vengera au moment venu. Et même dans ces moments là, ceux qui leur appartiennent, ils ne peuvent s'empêcher, s'infiltrant dans la moindre faille.