du bout des lèvres. (edmond)

je vous le dis du bout des lèvres;
vous m'agacez du bout du cœur.

éternelle réunion pour laquelle nolan doit te détester d'y assister. et pour être honnête, tu te fiches bien de passer pour le parent relou. tu veux savoir ce qu'il en est, de cette seconde dernière année de ton plus jeune fils. un soupir t'échappe, tu n'aimes pas spécialement ça, pour être honnête. et t'as été obligé d'arranger tes horaires. avoir travaillé ce matin et t'être levé à cinq heures n'arrange pas ton état. un soupir t'échappe, tu t'éloignes un peu du lycée, franchissant les grilles, avant de sortir un paquet de clopes de ta poche. t'en as besoin, à ce stade de la soirée. la nuit est déjà tombée et tu plains le pauvre lampadaire qui peine à éclairer le coin de la rue, crépitant seul dans son coin.

tu glisses une main dans tes cheveux bruns, il serait temps que tu les fasses couper, tes boucles brunes. parce qu'ils en sont à ce stade, boucler sur un coin de ta tête, mais pas totalement sur l'autre. mèches folles que tu as toujours plus ou moins détestées. soupir au bord des lèvres, tu cherches ton briquet, avant de glisser un tube entre tes lippes, de l'allumer, savourant cette première bouffée de nicotine bien méritée. tu t'appuies contre la grille, un soupir sur les lèvres, tandis que tu restes pensif. tu observes quelques courtes secondes cette mère au bord de la crise de nerf, son gamin traînant des pieds derrière elle, subissant les remontrances silencieusement.
pauvre gosse, qui n'a sans doute rien demandé, qui n'est sans doute pas très doué, pas fait pour ça,
un peu comme ton nolan, au fond. sauf que t'es bien trop papa-poule que pour ne lui infliger ça en public, aux oreilles de tous. tu as arrêté d'essayer, de toute manière. parfois tu as peur de ce qu'il va pouvoir devenir.

tu ris une nouvelle fois sur ta clope, coincée entre tes lèvres, laquelle tu viens faire tourner entre tes doigts. un petit froncement de sourcil quand y'a une silhouette que tu remarques au loin, s'approchant. bien trop familière comme silhouette, d'ailleurs. et pourtant, tu ne l'as pas vue souvent, à se mouvoir comme ça.
soupir au bord des lèvres, fumée qui s'en échappe.
bonsoir. que tu salues poliment, monsieur le professeur de mathématiques. monsieur un peu trop affectif sous lsd. tu remercies l'obscurité de d'hors et déjà t'empêcher de croiser ses prunelles trop claires trop facilement. comment allez-vous ? lui, sa descente de l'autre matin, sa blessure à l'arcade, ses bleus aux côtes, sa gueule de bois de l'autre fois. tu te pinces brièvement les lèvres.
bonsoir, edmond.

et hier soir, c'était edmond,
le roi du monde.
celui aux grands bras ouverts,
sur la fenêtre divers,
de fumette, de joint, de verre
un peu trop levé haut, comme toujours
comme hier et comme toujours.

parce que edmond, il a la tête remplit de foutaise. une caboche goinfrée de thèse et d'antithèse. démontrer par a plus b, cosinus d'une racine inventive, pour donner un chiffre rustique pour une science exacte de l'infime résonnement dont il fait preuve.
parce que edmond, depuis trop jeune- depuis toujours- depuis jamais, c'est la logique qui vient le plaquer à main nue contre le plexiglas. il peut rien y faire. c'est comme ça. un trois sera plus logique qu'un bonjour. une addition sera plus logique qu'une poignée de main. une fonction à deux inconnus sera plus logique que ces souvenirs embarrassants (ou ces rêves gênants) avec la gueule du père de nolan bryne en fond d'écran.

ça sort d'où? d'où sortes ces brides de mémoire étrange où, sa peau, ses yeux, son odeur se rapproche d'une litanie impeccablement douce, presque prise pour berceuse à ses yeux?

ce soir, entre un combat acharné dans l'arène parents contre professeurs, edmond s'était retenue plus d'une fois, de vomir dans sa poubelle à trou. hier soir n'était pas très brave. ce soir est pathétique. edmond, ombre de lui-même à la recherche d'un remède suprême.

pause.
terminé.
finit.
enfin.
sortie.
liberté.

après un bref arrêt dans quelques salles pour saluer ses collègues, edmond se ruait vers la sortie. sa bien-aimée sortie. il allait, ce soir, tomber dans les bras de sa vénus. bières et joints au programme, suivit d'un court et bref épisode d'une série quelconque. ou devrait-il, ne pas finir sa soirée tout seul? accompagné dans les bras d'une femme. ou d'un homme. son joint, déjà collé entre ses lèvres, problème. son briquet. son allume feu, presque conjoint, presque fiancé à ses débauches, où était-il passé?

au loin, un mec à la cigarette contre la grille. atout majeur dans ce silence de mort. edmond qui s'avance. edmond qui se dandine, avec sa besace en travers du torse. il se mouve avec hâte. parce qu'un joint ne se fait pas attendre.

ah.
mais c'est lui.
l'homme aux rêves.
l'eau de cologne à mélange javel.
rêve rêve rêve
ou
réalité réalité et si, et si
et si c'était vrai??????????

bonsoir. il aurait bien dessiné un sourire sur ses lèvres, mais le lampadaire n'offrira pas ce plaisir. pas ce soir. comment allez-vous ? edmond fronce les sourcils, penaud de cet échange. il retire le joint d'entre ses lèvres, prêt à toiser bryne de haut en bas. mais l'animosité semble s'être échappé. comme par miracle. comme par enchantement. comme par mélange de cologne et eau de javel. y a son crâne qui pompe contre ses tempes, y a son ventre qui gueule famine, y a ses jambes trop lourdes pour un soir de réunion, y a sa gueule trop morne par les excès d'hier soir. mais sinon bien. j'vais bien. il regarde sa montre. l'heure affiche qu'il est trop tard. dans un souffle, le gosse vient faire fondre son épaule contre le grillage. quitte à perdre son temps. autant le perdre en bonne compagnie????? t'aurais pas du feu? il laisse de côté les bonnes manières. bryne le voit déjà comme le démon qui a fait redoubler son gosse. à quoi bon rester dans cette barrière de politesse? puis toi, m'fin, vous. ça va? quoi de neuf?

quoi de neuf qu'il rajoute.
quoi de neuf qu'il ose.
quoi de neuf pour faire tomber un brin de malice dans son regard.
sans trop savoir pourquoi
comment qui où quand jamais
edmond trouve ça triste,
d'être trop loin
pour sentir ce mélange cologne javel
ou pas assez éclairé
pour agripper son regard pour ce soir.

tu te pinces les lèvres, soupires au froid ambiant régnant encore sur montréal. tu te mords l'intérieur de la joue, glisses tes doigts dans tes cheveux, fermes les yeux un court instant avant de venir glisser une cigarette salvatrice entre tes lèvres, tirant lentement et longuement dessus, savourant la nicotine dans tes poumons.
c'est drôle quand même, de savoir que t'es censé être de ceux qui réprimandent les fumeurs, mais que t'es le premier à le faire, tirer une clope de ton paquet. c'est pour ça que t'avais rien à dire à ton gosse, quand t'as découvert qu'il fumait lui aussi. t'étais pas légitime de l'engueuler réellement. un soupir t'échappe, tu glisses tes doigts dans tes cheveux et te mords l'intérieur de la joue.

silhouette qui se dessine au loin, celle que t'aurais bien volontiers observé un peu plus longuement encore l'autre soir, allongée sur ce lit d'hôpital. (mais c'était assez creepy, comme situation, alors tu t'es abstenu de le faire. mais bon.) soupir au bord des lèvres, crachant la fumée dans l'atmosphère.
banalité lâchée comme ça, parce qu'il faut bien, parce que t'as envie de savoir aussi. savoir comment il va. depuis la dernière fois, même si elle n'était pas vraiment à classer dans les rencontres les plus agréables et les plus propices à un échange entre deux personnes.

bien. j'vais bien. tu hoches faiblement la tête, te perdant un instant dans l'obscurité qui vous entoure. un soupir t'échappe, tu tires une nouvelle fois sur ta cigarette, lentement, la savourant sans doute un peu trop, pour éviter de la terminer trop rapidement. t'aurais pas du feu ? tu te mords l'intérieur de la joue un court instant. puis toi, m'fin, vous. ça va? quoi de neuf? toi, si tu veux. tu hausses un peu les épaules. c'est presque trop étrange d'en venir à le tutoyer, comme ça. juste comme ça.
ta main plonge dans la poche de ton manteau, en extirpe ton briquet pour le tendre au blond, l'air de rien, comme si ce n'était rien. parce que ce n'est rien, en réalité. tu te pinces brièvement les lippes. ça peut aller également. tu souffles finalement, après de longues secondes de silence, et une taffe supplémentaire. si on exclut le fait que j'suis debout depuis cinq heures du matin et que j'ai envie d'en foutre une à mon gamin pour qu'il se réveille un peu. tu ajoutes dans un rire, fermant les yeux, secouant la tête de gauche à droite, les traits tirés par ton sourire et ta fatigue. un long soupir t'échappe finalement. franchement, y'a pire. ça va, en vrai. tu souffles finalement, haussant les épaules.

(ouais, ça va.
ça va mieux.
un peu trop mieux depuis sa présence)

la hâte qui vient se lire sur le bout de ses lèvres.
le briquet en main, ce n'est plus un rêve.
il l'approche, bientôt le saint graal, bientôt sacré,
son joint qu'à quelques pas, il va y arriver.
là.
un tout petit mouvement de doigt.
la flamme qu'apparaît par magie,
lentement vient enflammer son bout de paradis.
et il aspire. et il aspire. si fort. si grand.
ses épaules se relâche.
son esprit se calme.
une drogue, pire qu'un camé,
edmond se sens rassasié.

il lui rend son briquet (voulant, en secret, le garder). ça peut aller également. et du tac au tac. cool. car le silence l'angoisse. ces longues pauses, peut-être pour simplement tirer un bout sur la cigarette. ravaler une taffe. pour trouver ses mots. pour chanter la sérénade. angoisse parfois futile, mais angoisse quand même. y a que sous l'effet de psychotrope qu'il retombe dans un délire de silence de bien-séance.
mais en attendant.
pas un bruit penchant.
pas un son résonnant.
juste deux respirations donnant,
à deux corps l'impression de se comprendre dans un silence.

si on exclut le fait que j'suis debout depuis cinq heures du matin et que j'ai envie d'en foutre une à mon gamin pour qu'il se réveille un peu. ils sont deux. la même misère de se lever tôt, de décuver, de bosser avec des plaies (vivantes ou non) et l'envie sereine de foutre une claque à tous les gosses de cette ville. ça fait rire edmond. doucement. gentiment. pas envie de froisser, l'papa poule, l'papa parfait.il est pas con nolan. il va bien finir par comprendre qu'il va falloir qu'il arrête de compter sur son père pour réussir.

et toc.
bam.
petite pique de prof, edmond ne pouvait s'empêcher. après plusieurs réflexions, de bryne à tellier, il avait bien son mot à dire. et puisqu'il a officiellement finit sa journée en tant que prof, il peut se permettre ce genre de réflexion. bien que, tangible à un appel au dirlo. franchement, y'a pire. ça va, en vrai. c'est vrai. y a pire. il y aura toujours pire que nolan. si y a que les maths qui bloquent, c'est qu'il est pas si con que ça. et puis c'est pas le dernier de sa classe. alors en effet, y a pire.

il n'avouera, que plus tard,
ou jamais,
que nolan le dépasse d'un demi-point.
c'est pas magique.
c'est pas grandiose.
mais ça met du baume au cœur aux deux bryne.
et à edmond, de pouvoir, d'ici, sentir l'odeur
javel, eau de cologne.

tu l'observes pendant de longues secondes,
t'aimerais pouvoir le faire encore et encore,
ne jamais t'en lasser, ne jamais décrocher ton regard du blond.
et pourtant, il le faut bien. tu te pinces brièvement les lippes.
t'es pas aveugle, t'vois bien que c'est loin d'être une cigarette,
entre ses lèvres.
(celles qui, bordel, t'attirent un peu trop, quand bien même la drogue s'y trouvant)

cool. un simple mot, avec autant de désinvolture. tu fronces un peu les sourcils en te mordant l'intérieur de la joue, observant le professeur quelques longues secondes supplémentaires. sans doutes trop longues d'ailleurs. tu te mords l'intérieur de la joue, un instant. nouvelles jetées à la volée alors que vous ne vous connaissez pas.
il est pas con nolan. il va bien finir par comprendre qu'il va falloir qu'il arrête de compter sur son père pour réussir. tu hoches faiblement la tête aux mots du bond, un soupir sur les lèvres, tandis que tu tires une nouvelle bouffée sur ta cigarette.

ça fait longtemps que j'le laisse se démerder avec ses DM de maths, crois-moi. un petit soupir t'échappe. t'étais pas une flèche non plus, en cours, ça faut l'avouer. et t'as bien rapidement abandonné. tu te mords l'intérieur de la joue, ton pied tapotes un instant le sol. puis y'a pire, non ? y'a forcément pire. c'est pas le dernier de sa classe. alors en effet, y a pire. tu hoches distraitement la tête.
et un nouveau soupir t'échappe.

tu glisses une main dans tes cheveux aux boucles naissantes, avant de tourner la tête vers le blond,
d'empêcher ton regard de glisser un peu trop longtemps sur son corps.
soupir au bord des lèvres.
j'pense que j'ai assez parlé de nolan pour aujourd'hui. tu souffles dans un soupir.
t'as envie de parler du blond,
d'apprendre à le connaître, un peu plus encore
et ne pas connaître l'homme défoncé.
juste l'homme, en face de toi.
simplement.