nice to meet you (travis)

Les derniers clients avaient terminé de manger depuis trente minutes et à présent, tu te retrouvais seule. Le tablier bien serré autour de la taille, tu t’occupais de ranger tables et chaises afin de retrouver au matin une salle déjà prête pour le service du petit déjeuner. C’était toujours le même processus. Une rengaine comme certains l’appelle et si quelques fois elle t’agace aussi, tu t’y es surtout habitué. Cet établissement à près de 80 ans, ouvert sous la direction de ton grand-père, un des hommes qui font partie de ta vie, une personne que tu respectes si fort que son travail est admirable. Les personnes ambitieuses sont inspirantes et personne ne t’enlèvera cet avis de la tête. Elles dégagent une force indescriptible qui t’inspire et pousse ton courage à émerger…toi qui rêve beaucoup, qui désire fort et qui n’ose pas forcément toujours. Alors oui…des fois tu t’autorises à penser que ce serait pas mal de découvrir autre chose que ce monde que tu connais par cœur. (…) Totalement perdue dans tes pensées, et encouragée par la musique qui passe dans tes écouteurs, tu n’entends pas, tu ne perçois d’abord pas cette personne qui rentre. C’est seulement quand tu crois voir un reflet furtif dans un des miroirs, que tu fais volte-face et vires jusqu’à l’accueil. Si ce n’est pas un client venu là pour dîner car le restaurant est fermé à cette heure-ci, il s’agit probablement d’une personne qui cherche une chambre pour la nuit. Tu as sourit poliment, te présentant alors. Ce serait mentir si tu niais le fait que tes joues sont devenues un peu rouge, car tu ne t’attendais pas à voir un si beau garçon. Prise de court, tu as inscrit son nom dans le planning de cette nuit et tu as coché l’option breakfast avant d’imprimer la facture et de lui faire signer. Le trousseau de la chambre entre tes doigts fins, tu l’as vite tendu au jeune homme, lui souhaitant une bonne nuit.

Levée très tôt ce matin, tu étais là à la première heure. Comme à ton habitude tu as bu ton chocolat chaud en compagnie de l’une des employées de ton père et tu as supervisé les équipes pour mettre en place les tables du petit-déjeuner. Tu es à la fois serveuse, hôtesse et chef de groupe. Polyvalente. De par la confiance que peut avoir ton père en ton égard et aussi parce que tu es ancrée dans l’affaire familiale depuis ta naissance. Et aujourd’hui, exceptionnellement - tu dois assurer le rangement et l’entretien des chambres car la femme de ménage est malade et donc en repos jusqu’à la fin de semaine. Comme à ton habitude, habitude qui déplaît un peu à ton père car tu es sitôt enveloppé dans ta bulle et donc selon lui moins attentive, tu branches tes écouteurs et l’air de David Bowie résonne dans ta tête. Un des écouteurs pendant sur ton épaule, tu pousses le chariot d’entretien jusqu’à la porte 42. Il est 8 heures 30 et théoriquement, le client qui a dormi là devrait être en bas, en train de prendre son petit déjeuner… Toc, toc. Quelques coups sur la porte pour te manifester, ta voix s’élève ensuite : ’’Il y a quelqu’un ? C’est pour le ménage.’’ Silence de l’autre côté de la porte, alors tu dégaines ton pass et ouvres pour entrer et commencer le travail. Consciencieuse de faire du bon travail et ne te doutant pas une seconde qu’en réalité…l’occupant de la chambre se trouve encore ici.
Présentement, tu es face aux fenêtres pour tirer les rideaux et faire entrer la lumière du jour. Tu fermes une seconde les yeux pour profiter de la chaleur qui s’en dégage, bien qu’elle soit discrète car l’hiver n’est pas encore terminé. Aujourd’hui, il fera beau : le soleil qui perce le ciel auparavant blanc opaque de la veille - promet une belle promenade au chœur de Montréal quand tu seras libre cet après-midi.

Depuis quelque temps, tu dors dans ta voiture ou les motels. Ton ancien appartement était tellement crasseux et délabrer que, tu en pouvais plus d’appeler le proprio pour qu’il passe vérifier la moisissure dans la salle de bain, ta chambre et un peu partout. Tu l’as envoyé promener sur son répondeur en disant que tu aimais mieux payer pour dormir dans des motels que son pourri d’appartement. C’est du pur poison pour tes poumons et étant ex-consommateur, ton système et ton corps est déjà assez endommagés ainsi, t’a pas besoin de te rendre malade en plus. Ton frère peut bien se plaindre d’être dans ce centre pour jeune délinquant, mais tu préférais être à sa place que de crever de froid dans ta voiture ou dormir dans le bus... Dormir dans les motels que tu passes parce que chaque foutu appartement que tu visites... c’est de la poubelle. Ton job de concierge te donne assez d’argent et ton job de serrurier est bien utile, tu as l’impression que tout le monde oublie leur clé dans leur voiture ou leur maison dernièrement, tant mieux pour toi, cela te fait de l’argent. Ton frère t’en a demandé un peu, mais tu as refusé de lui en donner, hors de question, tu sais ce qu’il va en faire, alors, tu lui as demandé ce qu’il voulait pour aller l’acheter avant de repartir sur la route. Lui souhaitant bonne nuit avant de lui faire un câlin de bro, tu as souri en lui tendant ses magasines et son souper.

Tu es épuisé, ce soir, tu t’es rendu à ce petit restaurant motel. Lorsque tu es entré, tu trouvais l’ambiance si calme à la réception que tu t’es demandé si c’était fermer. Tu as croisé les doigts parce que tu avais réellement besoin d’une chambre pour la nuit. C’est à ce moment-là qu’une voix s’éleva dans la pièce. Te retournant face au comptoir, tu es tombé face à une jeune femme ravissante. Ses joues rougies légèrement, tu as remarqué avant de sourire doucement face à elle. - J’aimerais vous louer une chambre si possible... avais-tu prononcé calmement. Tes yeux ne la quittant pas, parfois peut-être pour voir qu’elle écrivait ses notes et aussi lorsqu’elle te tendit le crayon pour signer avant de te remettre la facture. Vos regards s’étaient accrochés avant que tu ne recules en la remerciant et lui souriant. -Bonne nuit, avais-tu soufflé avant de sortir pour te rendre à ta chambre. Aaah, enfin tu retrouvais le matelas moelleux d’un lit. Tu pouvais enfin dormir paisiblement et sourire en repensant au beaux yeux bleus de cette jeune femme à la réception. (...)

Tu ne veux pas sortir du lit, tu es bien enroulé dans les draps. À cette heure-ci, tu devrais déjà dû dégager la chambre pour aller prendre ton déjeuner et faire la route. Cependant, tu as les yeux qui se referment tout seul, jusqu’à ce que tu décides de t’asseoir d’un coup. -Réveil toi merde... marmonnes-tu pour toi même. Tu te passes une main sur ton visage pour après observer l’heure, tu as bien le temps de prendre une douche avant de partir. Te levant, tu te débarrasses de ton boxer et le jettes dans ton sac, tu iras au lavoir aujourd’hui pour laver ton linge sale. Tu as refermé la porte derrière toi et tu as fait couler l’eau de la douche pour finalement entrer dedans. L’eau chaude qui coule sur ton corps et sur ta tête, tu n’entends pas cette voix qui appel à l’extérieur de la chambre et ni les coups à la porte. Tu passes quelques minutes en dessous de l’eau pour te détendre. Lorsque tu sors de la douche, tu fronces les sourcils, tu ne trouves pas de serviette de bain alors que tu es tout trempé et que ton corps dégoûte partout sur le plancher de la salle de bain. Tu soupires - non sans déconner, murmures-tu pour toi même, c’est bien ta chance à toi, mais il y a pire de l’autre côté de la porte. Insouciant, tu lâches un juron et te redresse après avoir regardé partout... Tu hausses les épaules et tu ouvres la porte de la salle de bain pour revenir à ta chambre nu comme un ver. Non, tu ne t’attendais pas à ce que quelqu’un soit entré dans ta chambre, non tu ne pensais pas tomber sur elle en plus de ça. Tu t’étires en passant les bras derrière ta tête en baillant quand soudain, tu la remarques au bord de la fenêtre les rideaux grands ouverts, tu figes sur place un instant. Tu voudrais bien prendre tes vêtements, mais le hic est que ton sac est à ses pieds, donc... Tu ne trouves nul autre que ta main pour cacher ta partie la plus intime de ton corps, tu n’as pas envie de la voir crier non plus et qu’elle te prenne pour un déranger prédateur sexuel. Tu clignes des yeux en pinçant les lèvres et tu tousses légèrement pour attirer son attention -hum, excusez-moi, ça vous gênerait de juste fermer les rideaux un instant ? Okay, la situation est malaisante, mais en même temps, tu ne peux qu’en rire doucement face à sa réaction lorsqu’elle se retourne vers toi.

Ce matin encore, quand l’alarme de ton téléphone a sonné 5:00, ça avait été dure de sortir du lit. Il y a des fois où c’est plus compliqué de se motiver, mais le fait que tu puisses avoir ton après-midi de libre aujourd’hui, avait fini de t’encourager. Ainsi, après le travail tu pourras vaguer à tes occupations et ne plus te préoccuper des responsabilités que tu as au choeur de ton travail. Sans doute que ton père te demande plus d’exigences qu’à n’importe quel employé, mais peux-tu lui en vouloir ? Cet hôtel, ce restaurant…c’est une histoire de famille et donc une réputation à tenir. Car si d’allure, l’établissement est vieux, tu as su - peut être de par ton regard féminin - lui apporter un peu de fraîcheur. C’est en cours et il est parfois difficile de faire entendre raison à ton père ou à ton grand-père, mais tu ne désespères pas. Là…n’est pas la question. Tu prends une seconde pause, alors que la journée est déjà bien entamée pour toi. Souffler, prendre le temps de penser à quelques futilités qui apaisent l’expression de ton visage. Et ce soleil…cette lumière qui vient réchauffer ta peau.
Tu es loin de t’imaginer ce qui t’attend. Présentement, la porte de la salle de bain s’ouvre derrière toi. Il en sort ce jeune homme entièrement nu, lui-même naïf car il se croit seul. En toute intimité. Cependant, votre journée semble vouloir commencer de façon originale. Si tu as rougit la veille en le découvrant à l’accueil, qu’en sera t-il maintenant ? Un, deux, trois… ’’Hum, excusez-moi…’’ Tu as rouverts les yeux, en grands, le coeur qui s’emballe déjà. Tu te trouves idiote d’avoir cru que le silence voulait dire que la chambre était vide…que son ex-dormeur était en bas, à la table du petit déjeuner. Figée pour l’instant, tu ne sais pas quoi faire d’autre à part te pincer les lèvres. ’’…ça vous gênerait de juste fermer les rideaux un instant ?’’ Hein, com..ment ? Tu fais ainsi volte face et le découvrir alors. Le rouge te monte instantanément aux joues. C’est bien la première fois que tu vois un homme nu. ’’Mon dieu ! Je suis navrée..navrée ! Oui..Oui bien sûr, tout de suite.’’ Voilà que sous la panique, tu parles extrêmement vite. Comme si ton esprit qui assimile la situation s’accélère à la fois pour trouver une solution au problème. Tu détaches ton regard de ce corps distrayant et intimidant à la fois pour agripper les rideaux et les refermer à la hâte. Tu t’en veux réellement d’avoir brusquer la matinée de ce client. ’’Je suis réellement désolé, je pensais que vous aviez quitté la chambre…je, je vais sortir, repasser plus tard..’’ Tu es toujours face à la fenêtre, ne trouvant pas d’autres solutions encore, mais le reflet qui se dessine sur la vitre te fais encore plus perdre contenance. Les lumières de la chambre étant toutes allumées, tu vois clairement sa nudité encore…bien qu’il s’avère d’un juste reflet. Tu t’agites alors, pour filer jusqu’au chariot de service que tu as apporté. Dans l’optique de t’en aller, de le laisser seul. Mais alors…une question te traverses l’esprit. Et tu le regardes seulement du coin de l’oeil. Brièvement. ’’Vous n’avez pas trouvé de serviette de bains ?…’’ Mais si, ça doit être le cas ! Et là tu es seulement plus idiote que tout. Car peut être qu’il n’avait pas eu simplement l’envie d’enrouler la dite serviette autour de lui après sa douche.
Tu es censée être sortie depuis le temps que tu le dis, mais non - tu es là, à attendre une réponse, à une question totalement absurde.