may we meet again | isabella

Une journée banale, ordinaire. Une journée dont tu avais l’habitude. Une journée comme toutes les autres auparavant. Ou du moins, c’est ce que tu croyais lorsque tu as ouvert les yeux le matin même. Tu étais ainsi, un homme d’habitude, de routine, de constance. Que cela convienne à ton entourage ou non. Au vue de la vie que tu mène, des risques qui sont toujours présents, tu trouve un certain réconfort dans la routine de ta vie. Tu alterne entre la légalité et l’illégalité. Et ce, d’une manière bien trop facile pour que cela soit normale. Toi qui vis ainsi depuis bien des années. Toi qui accumule les tâches illégales, les mauvaises actions. Tu ne devrais guère voir d’inconvénient à poursuivre. Ton âme est déjà anéanti, ruiné, détruite. Tu n’as aucune chance de rédemption, de pardon lorsque le jour viendra. Il n’y a que le néant qui t’attends. Que la souffrance, que les remords de toutes les actions horribles que tu auras effectué tout au long de ton existence. Ainsi va la vie. Tu l’as compris depuis déjà plusieurs années. Peut-être est-ce pour cela que tu ne cherches plus le pardon, que tu ne cherches plus une solution à tes problèmes de moral. Tu subis, tu endure et tu inflige ce que l’on demande. Quand bien même, à l’intérieur de toi, il y a toujours cette voix qui hurle d’arrêter, qui hurle que tu devrais trouver une autre alternative à ta vie. Ce que tu tente discrètement de faire. Mais, il s’avère que déserter la mafia n’est pas chose facile. Comme tu pouvais le prévoir. Alors, tu garde le silence sur ce petit projet, sur cet espoir qui brille à l’intérieur de ton regard. Tu continue d’être le bras droit que tu as toujours été. Fidèle, loyal et prêt à tout pour le bien de la communauté. Ainsi es-tu depuis les débuts. Ainsi seras-tu jusqu’à la toute fin. Ce qui ne t’empêche aucunement de vouloir en sortir. Toutefois, ce n’est pas aujourd’hui que tu trouveras cette solution. Ce n’est pas aujourd’hui que tu vas pouvoir travailler sur ce petit plan secret. Bien au contraire. Aujourd’hui, il y a des tâches qui doivent être effectués. Des tâches que toi seul est en mesure d’effectuer au vue de ton passé, de ton expérience au sein du groupe. À ton grand malheur, tu te dois d’être accompagner. Tu ne peux te présenter à un tel rendez-vous seul. Sans renfort, sans soutien. Tu n’en as pas besoin, mais ainsi fonctionne le domaine. Seul, tu serais vulnérable. Seul, tu serais une cible facile. Alors, tu te concentre sur ce que tu dois faire, ne tenant aucunement compte de la présence de cet homme, ou plutôt cet enfant qui marche à tes côtés. Tu le vois tenter d’être imposant, tenter d’être convaincant sur son image de dur à cuire. Toi, tu sais qu’il ne représente rien. Ni menace ni peur. Ce n’est qu’un gamin parmi tant d’autre qui espère faire ces preuves aujourd’hui, qui espère apprendre quelque chose que personne ne sait. Après tout, ils pensent tous ainsi lorsqu’ils sont auprès de toi. L’un des anciens, l’un des fondateurs. Réflexion qui t’amuse tout en te décourageant. Parfois, ils sont discrets dans leur admiration. D’autre fois, ils sont une véritable plaie. Comme lui. Toi, tu te contente de marcher normalement, cigarette à la bouche, le regard fuyant ceux des passants. Tu aimerais être loin de ce gamin, loin de ce qu’il tente de prouver. Mais, tu ne peux pas. Jusqu’à ce que tu l’entende siffler. Comme un chasseur qui vient de trouver une proie, il se redresse et avance d’un pas rapide vers une jeune femme à la chevelure blonde. Tu n’y porte pas beaucoup d’attention, conscient qu’il n’a aucune chance. Encore moins avec une telle créature. Toi, tu le vois bien. Elle est trop bien pour lui. Tu ralentis alors la cadence, prêt à te moquer de lui ou simplement l’empêcher de trop se ridiculiser. Un cas comme l’autre, tu es prêt. Toutefois, lorsque la dite jeune femme se retourne, tu reconnais son visage à la seconde. Tu te souviens lui avoir déjà parlé par le passé, au garage. Elle était venue avec sa voiture pour un petit problème. Tu as été celui prenant en charge son véhicule. Et toi, naturellement, tu avais opté pour la conversation plutôt que le travail silencieux. Conversation qui a été bien plus agréable que tu ne serais prêt à l’avouer, encore moins aujourd’hui. De ce fait, tu refuse de laisser le gamin tenter quoi que se soit de supplémentaire auprès d’elle. D’un geste rapide, brusque, tu attrape son bras et le tire vers l’arrière. Lançant ta cigarette au sol, tu plonge ton regard dans le sien, lui ordonnant de se taire, de ne plus prononcer le moindre mot et de se faire petit. Que s’il tente quelque chose auprès de cette ravissante jeune femme, il devra d’abord passer par-dessus lui. Chose que personne en ce monde ne semble être en mesure de faire. Tu vois la peur dans son regard, tu vois l’obéissance. Un petit sourire satisfait prends place sur tes lèvres alors que tu te retourne vers la belle, un air bien plus délicat prends place sur ton visage. “Pardon le gamin, il ne sait pas vivre et ne sait pas s’adresser aux femmes…” Commences-tu avant de poser un nouveau regard sombre sur cet enfant dont tu as la charge pour la journée. “Il ne sait pas comment s’adresser à une véritable femme, tel que toi.” Doucement, ta voix devient tendre, suave. Tu ne tente guère de séduire cette femme, bien au contraire. Ou du moins, ce n’est pas ta première intention. “J’espère qu’il n’a pas ruiné ta journée, Isabella.” Lui demandes-tu, prononçant son prénom doucement, diminuant un peu plus la distance présente entre ton corps et le sien. Ce gamin bouge derrière toi, comme s’il voudra suivre ton mouvement. Chose que tu lui fais comprendre d’un geste de la main, il recule. L’autorité, tu es ravi de la maîtriser avec les membres plus jeune du groupe.

La loyauté. La fidélité. Deux choses qui, pour toi, ont toujours été très importantes, très précieuses. Tu as toujours cru être un homme pourvu de ces deux qualités, et ce, sans l’ombre d’un doute. Tu ignore si cela s’applique dans toutes les facettes de ta vie, mais tu ose l’espérer. Tu ose croire que tu es un homme loyal et fidèle, autant auprès de la communauté russe à laquelle tu appartiens depuis des années, autant auprès de ta femme et de ton fils. Cependant, les doutes sont présents concernant ces deux personnes. Tu crains de ne pas être à la hauteur. Tu crains de les impliquer dans des situations auxquelles ils ne devraient pas. Ton fils, il aime faire comme toi, il aime te suivre. L’amener au garage, lui montrer quelques petits trucs de mécanique, tu aimes, tu adores mêmes. Mais, l’autre côté de ta vie, tu refuse de l’impliquer. Tu refuse de lui montrer. Il est encore jeune, il est encore pure. Tu espère que jamais, ô grand jamais il ne mettra les pieds dans cet univers que tu ne connais que trop bien. Cet univers cruel, difficile et possessif. Oui, possessif. Toi qui aimerait sortir de ce groupe, sortir de ce mode de vie particulier, tu es pris au piège. Tu ne parviens guère à trouver une sortie. Comme si tu étais en cage. Comme si tu étais pris au piège. Pourtant, tu les aime ces personnes. Avec les années, ils sont devenus tel une seconde famille pour toi, tu ne peux le nier. Ils sont proches, ils sont présents et ils sont de confiance. Aucun doute. Mais, ils sont aussi dangereux, peu fréquentable. Tu ne les recommanderais à personne, mais vraiment personne. Alors, tu croise les doigts pour ne pas croiser de visage connu lorsque tu es en mission pour la mafia. Comme aujourd’hui. Aujourd’hui, tu dois te présenter à un rendez-vous bien particulier, accompagné par l’autre des gamins du groupe. Tu ignore son âge, son passé ou même son histoire. À tes yeux, ils sont tous des gamins sans expérience, qui n’espère que vive des sensations fortes ou apprendre quelques choses de nouveau. Tu le sais, ils sont tous comme cela. Surtout en ta compagnie. Tu sais comment ils veulent tous partir avec toi, espérant que tu sois un grand maître, un grand coéquipier. Alors que, en réalité, tu ne représente rien de cela. Peut-être es-tu fort. Peut-être es-tu imposant. Ce n’est pas pour autant que tu es invincible. Comme tout être humain de ce monde, tu possède des points faibles, des faiblesses, des sujets sensibles. Tu es toujours prêt au combat, ton passé est là pour le démontrer. Toutefois, tu commences à espérer autre chose pour toi, pour ton avenir. Chose qui s’avère être plus complexe, plus ardu que tu ne le croyais. Tout comme éviter les personnes connus au garage. Car, tandis que tu déambulais dans les rues, en direction du lieu de rendez-vous, suivi par ce stupide gamin qui tente d’impression quiconque qui croise sa route, tu tombe sur une femme. Une jolie femme. Toi, tu aurais voulu ne pas la connaître, tu aurais voulu poursuivre ta route. Mais, le gamin, il espère tenter une approche auprès d’elle. Toi qui pensais le laisser faire, rire de l’échec cuisant qu’il allait essuyer, tu te retrouve rapidement entre lui et la jeune femme. Tu la connais, elle est venue au garage il n’y a pas si longtemps. Elle est belle, ravissante même. Tu pose un regard sur elle, et tu crois voir un ange. Ce n’est pas une pensée bien pure pour l’homme marié que tu es, mais c’est plus fort que toi. Son charme naturel, son sourire angélique, sa chevelure longue et parfaite… Tu es conquis. Tu veux rester sage, rester à distance de cette ravissante créature, mais il semble que le destin est choisi un autre parcours pour toi, pour elle. Pour vous deux. Sans attendre, tu attrape le gamin et lui fait comprendre son erreur. Tu es froid, tu es agressif avec lui. Une facette de toi que tu n’étais pas impatient de montrer à cette femme. Bien au contraire. Tu préférais qu’elle voit en toi l’homme gentil, serviable et honnête qui travaille au garage. Non l’homme agressif, violent et colérique que tu dois être au sein de la mafia, inspirant ainsi le respect des autres membres du groupe. Respect dont tu ne tiens pas compte, mais qui semble être important malgré tout. Alors, tu remets ce gamin à sa place, t’excuse auprès de la belle et affiche un tendre sourire. Sourire qui s’agrandit lorsque tu entends les premières paroles de la jolie blonde. “Quelque chose me dit que tu as eu ton lot de malchance avec les hommes. Tentons de ne pas allonger cette liste avec cet imbécile de gamin…” Les derniers mots que tu prononce finisse siffler entre tes dents. Tu le déteste, tu lui en veux. S’il aurait poursuivit sa route, tu n’aurais pas rencontré cette belle créature dans de tel circonstance. Elle n’aurait pas eu à connaître ce côté de toi. “Moi, en faire beaucoup? Impossible.” Dis-tu, laissant un petit rire franchir tes lèvres avant de laisser ton regard scruter la belle, de la tête au pied. “De ce que j’ai sous les yeux, tu dois être le genre de femme qui mérite beaucoup mieux que ce gamin. Il n’a aucun respect et aucun avenir s’il poursuit sur cette route… Alors que toi… toi, tu pourrais avoir tout ce que tu veux, c’est certain.” Chaque mot, tu les penses réellement. Tu n’es pas un homme qui ment, qui détourne la vérité. Au contraire. Tu es franc. Tu es honnête. Et tu l’es sûr beaucoup de chose. Et lorsqu’il s’agit de femme, jamais aucun mensonge n’a franchit tes lèvres. Puis, vint la question que tu aurais voulu ne pas entendre… Le baby-sitting. C’est une manière de voir les choses. Enfin, tu ne pouvais lui répondre aussi honnêtement, aussi franchement que tes précédentes paroles. Impossible. Cela serait trahir la mafia. Trahir ta seconde famille. Tu te contente de lever les yeux au ciel, ne portant plus la moindre attention au gamin tout près qui ose à peine respirer, qui ose à peine bouger. Tu sens qu’il craint ta prochaine réaction à son égard, ce qui est bien. Ainsi, il restera calme un petit moment. Passant alors une main derrière ta nuque, tu porte un nouveau regard vers ton interlocutrice qui te fait fondre de son simple regard. “M’en parle pas… Du baby-sitting, c’est bien le cas de le dire.” Tu secoue négativement la tête, découragé. “Un collègue du garage voulait que je fasse visiter un peu la ville à son fils, mais il a oublié de me préciser à quel point il peut être enfantin et irrespectueux avec les autres.” De nouveau, un soupir franchit tes lèvres. Tu es habile avec les mots, avec les mensonges. Et ce, contre ton gré. Tu te doute que le dit gamin derrière toi risque de faire un drôle de visage, une drôle d’expression. Cette simple réaction pourrait détruire le mensonge que tu viens de raconter à la belle blonde. Mais, c’est pour son bien à elle. Tu ne peux lui expliquer dans les détails. Tu ne peux lui raconter tes activités illégales. “L’avantage, c’est que j’ai pu te revoir. Et ça, je t’avoue que ça fait ma journée… J’avais bien besoin d’un peu de beauté à travers tout ce gris.” Un sourire vient prendre place sur tes lèvres. Un sourire doux, charmeur. Autant tu pense ces mots. Autant tu tente de changer de sujet pour éviter de raconter n’importe quoi. Il ne te reste qu’à espérer qu’elle acceptera de nouveaux compliments en ta provenance, et que son attention ne quittera guère ton visage.