tu pouvais être un véritable boulet parfois, sun-hee. t'avais deux pieds gauche. tu voyais pas d'autre option. parce que vu comment tu t'étais vautrée et devant qui tu t'étais gamelée, tu devais forcément être maudite. ou alors ta marraine la bonne fée (pas que tu crois à ce genre de trucs m'enfin) s'était mise minable avant de se pencher sur ton berceau. parce que te voilà aux pieds d'ethan. que t'as déjà rencontré. dans des circonstances tout aussi maladroites. tu lui avais alors renversé ton café dessus à l'olimpico. et aujourd'hui, tu ne fais pas mieux. tu tombes à la renverse, juste devant lui. tout ça parce que t'as voulu prendre l'air, éviter la ville souterraine et faire quelques photographies en extérieur et quelques vidéos pour ta chaîne youtube. la prochaine fois, t'y réfléchiras à deux fois. ça t'évitera de t'afficher une fois de plus. et que ton appareil photo se retrouve dans la neige. comme maintenant justement. heureusement qu'il est assez résistant et a déjà à peu près tout vécu. en attendant, tu restes aux pieds d'ethan, tu sais pas comment agir. tu l'as quand même presque entraîné dans ta chute. visiblement t'étais à un petit chouia de l'avoir conduit avec toi par terre parce qu'il se tenait actuellement au dos d'un banc pour ne pas tomber. d'un côté, c'était pas vraiment ta faute parce qu'il y avait des plaques de verglas et que t'avais glissé sur l'une d'elles. de l'autre, t'étais maladroite et ça, c'était bien ta faute. pas celle de la météo. toujours installée par terre, tu pris enfin la parole. ou plutôt ... t'osas la prendre. toute timide. toute apeurée. il devait te prendre pour un sacré boulet, n'empêche. « je suis ... je suis ... je suis vraiment désolée. » t'avais l'impression d'être un enfant ayant fait une bêtise. tu te faisais toute aussi petite que possible. minuscule. t'aurais tellement préféré être une souris à ce moment-là. et t'étais encore par terre. t'avais peur de te relever, de retomber et de l'entraîner vraiment dans ta chute cette fois-ci. « c'est toujours ma faute. pardon ... » t'avais pas envie qu'il te prenne pour une victime. mais t'espérais quand même qu'il se rappelle de la fille maladroite qui avait renversé son café sur lui un beau jour ... même si c'était sans doute pas le souvenir le plus agréable qu'il allait garder d'elle.
Ne vas pas sur le Plateau avec ta voiture. Pas avec ces restes d’hiver pourri. On me l’avait dit, plus d’une fois. La première fois, je l’avais pris à la blague, puisque je supposais que mon interlocuteur ne savait pas, ou ne se souvenait pas, que j’avais habité à Toronto. Mais puisque ça semblait se répéter, j’avais fini par prendre le conseil, le mettre dans un coin de ma tête, dans l’idée que cela me serve un jour, ou pas. Et finalement, il m’avait servi plus rapidement que je ne l’aurais cru; il allait me servir aujourd’hui. En effet, j’avais rendez-vous avec un potentiel client dans ce fameux quartier, j’étais sur le point de prendre les clés de ma voiture, aller la démarrer dans le parking souterrain auquel j’avais droit dans mon immeuble - fort pratique soit dit au passage - pour prendre la route à l’adresse qu’on m’avait fournie, mais finalement, je me ravisai. À la place, je cherchai un chauffeur Uber, qui arriva deux minutes après. L’avantage de rester en plein coeur de la ville, là où la majorité des gens passaient. Je lui donnai l’adresse, il acquiesça, prêt à s’y rendre, mais quelques centaines de mètres avant la destination, il se retrouva embêté par les bouchons, par les rues chaotiques. Supposant que je pourrais finir à pied, je dis au chauffeur de me déposer là où nous étions, et ayant payé la course au préalable sur mon téléphone, je le remerciai et je sortis du véhicule. Arpentant les environs, je regardai l’adresse, Google Maps, supposant que traverser le parc qui se trouvait devant moi m’aiderait à me trouver à destination. Commençant à marcher, ma route ne fut pas bien longue que je me trouvai soudainement percuté. Dans un geste de secours, je m’agrippai à ce que je trouvai - un banc, heureusement - mais la personne qui m’avait percutée, elle, n’avait pas eu autant de chaise. Retrouvant mes esprits, je considérai la scène, voyant un appareil, la jeune femme, confuse, se fondant en excuses, dans une soumission qui avait presque quelque chose de triste. Peu perturbé, je restai fidèle à moi-même, disant: « Ne vous excusez pas, je n’ai rien. » Bon je n’avais pas à m’excuser non plus, ce n’était pas moi qui s’était rétamé lamentablement - l’avantage des chaussures pour hommes versus les talons de ces demoiselles - la bousculant au passage. Enfin bref, là n’était pas la question. Regardant l’appareil, je le pris, demandant: « C’est à vous ? » Et encore une fois, je revins à mes habitudes, disant: « C’est peut-être à lui qu’il faudra vous excuser… » Moi, taquin ? Me moquant d’elle ? Oui et non. Ce n’était pas fait par méchanceté, mais juste parce que… C’était moi. Et elle était consciente, visiblement pas blessée pour le moment… Pourquoi en faire tout un cas ? Je n’avais plus de temps dans ma vie pour ça, ni l’envie de me prendre la tête pour une connerie du genre.
Sun-Hee Cheong
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t’étais un boulet quand tu t’y mettais. enfin tu pouvais en mettre un. t’avais bien une doléance à faire ou peut-être même deux ou trois à faire à tes parents. principalement pour te plaindre de tes deux pieds gauches. t’avais pourtant fait de ton mieux pour mettre un pied devant l’autre. mais cela ne t’avait aucunement empêché de tomber sur ton joli petit popotin. et tu t’étais bien évidemment affalée comme une merde. heureusement que tes copines n’avaient pas été présentes ou elles se seraient fait un véritable plaisir de te charrier avec ça pendant des jours et des jours. t’étais même presque sûre qu’elles n’auraient pas hésité à en faire mention dans des années le jour de ton mariage. mais c’étais ta faute. tu t’affichais toi-même. et évidemment, tu le faisais devant les mêmes personnes. parce que le faire devant des inconnus, que t’avais donc jamais croisé par définition, ça aurait été trop beau. ça aurait été bien trop simple pour toi. dans ta chute, t’avais failli entraîner quelqu’un. par chance, cette personne n’avait rien. enfin une bonne chose. « bon … et bien tant mieux … », dis-tu d’une toute petite voix. tu te sentais mal. et par-dessus tout, tu l’enviais. t’aurais bien troqué tes chaussures à talons contre les siennes, à plat. celui qui avait inventé ces objets de torture n’avait clairement jamais eu à marcher avec lorsqu’il neigeait. ou même d’ailleurs à tout autre moment de l’année. le type en question t’apostropha ensuite. et tu le regardas avec un air ahuri. de quoi est-ce qu’il voulait bien parler ? « hmm ? pardon ? » t’écarquillas les yeux. tu ne voyais toujours pas où il voulait en venir jusqu’à ce que tu ne regardes un peu partout. oooh ton appareil photo ! maintenant tu voyais où il souhaitait en venir. « effectivement, c’est à moi. merci. » c’était toi ou bien se moquait-il ouvertement de toi après ça ? « vous n’avez rien de cassé ? vous n’êtes pas blessé ? », t’enquis-tu alors que tu récupérais ton appareil photo et que tu vérifiais si rien n’était trempé, cassé, abîmé. et s’il fonctionnait encore. t’hésitais à proposer au type de lui payer un verre pour t’excuser mais tu ne savais pas trop si c’était malvenu ou non.
Peut-être que cet appareil photo n’était pas le sien finalement, ce fut ce que je crains quand elle ne parut pas vraiment savoir ce que je racontais. Si c’était le cas et que l’appareil photo n’était pas le sien, dans ma tête, ce serait beaucoup trop absurde. Qui laisserait un appareil de ce genre, qui devait coûter plusieurs centaines de dollars, au beau milieu d’un parc ? J’avais beau ne pas tout à fait connaître cette ville, quelque chose me disait que ce n’était pas suffisamment sécuritaire pour que quelqu’un laisse ça volontairement quelque part. Ou bien c’était un hasard, une coïncidence ? Ça non plus, je n’y croyais pas tant. Heureusement, la jeune femme reprit ses esprits, confirmant que c’était bel et bien à elle, venant faire taire tout scénario un peu bizarre qui pouvait se former dans ma tête. Lentement mais sûrement, elle reprenait contenance, ou plutôt, ce fut ce que je pensais, jusqu’à ce qu’elle me demande si j’allais bien. N’était-ce pas là chose évidente ? Je ne lui en voulus pas, me sentant bien mal placé pour râler de quelconque façon. Tout ce que je fis, ce fut de dire: « Non, tout va bien. » Bon d’accord, ne m’attendant pas à une telle chose, j’étais peut-être un peu… bouleversé, mais rien de grave. Enfin, pas de quoi me perturber pour le reste de la journée, mais pas de quoi me faire reprendre ma marche immédiatement, comme si rien n’était. En effet, je me dis que le minimum serait de lui demander: « Ça va… ? » Elle ne semblait pas blessée aux premiers abords, mais trop peu familier avec les talons et la maladresse de certaines personnes, je me disais que ce serait le moindrement sympathique de lui demander, et voir après ce que je ferais, tout dépendant de sa réponse, en espérant toutefois ne pas me retrouver dans une situation où je devrais appeler les secours ou quelque chose du genre et éventuellement arriver en retard à mon rendez-vous.