(im)personal chaos - timaé & ezra

Un regard sur l’horloge de la salle de classe, un autre sur la feuille sous tes yeux. Au lycée, pour le dernier cours de la journée. Un cours de mathématiques, pas ta matière favorite mais pas la pire à tes yeux. T’es un élève attentif, t’écoutes quand le professeur s’adresse à la classe. Tu fais partie des premiers à sortir une feuille pour prendre des notes. Tu fais attention à bien tout écrire, à faire en sorte que ce soit clair et ordonné. Parce que même si tu ne comprends pas ce que tu rédiges, t’as déjà la satisfaction que ce soit bien présenté. Or là, t’as complètement délaissé tes habitudes. T’écoutes vaguement l’instituteur, dessinant des cubes en perspective pour passer le temps. C’est plutôt ton genre d’être rêveur. Mais pas dans l’enceinte du lycée. Ici, tu prends les choses au sérieux, parce que tu penses au long terme. Si t’écoutes pas, ça te prendra plus longtemps à comprendre chez toi, et t’auras l’impression de prendre du retard. Logique que tu tiens à respecter dans n’importe quelle matière, même si pour certaines, tu t’autorises quelques écarts. Tu bouscules tes bonnes intentions et tes pratiques et ce, pour une bonne raison. Ta propre vie est en train de prendre un nouveau tournant. Tournant qui te préoccupe l’esprit la majorité du temps, depuis quelques mois. Le divorce de tes parents t’impacte plus que tu ne le pensais. Et même si tes parents ont voulu être rassurants avec toi, même si tu t’es juré de faire abstraction dès que tu traverses le portail du lycée, t’arrives pas à ne pas y penser. Les conséquences que cela engendrent te hantent et parasitent ton sérieux. De ce fait, tes résultats baissent. Pas au point d’alarmer tes professeurs parce que tu n’irais pas jusqu’à abandonner tes études. Mais tu peux faire mieux, tu le sais. Mais t’en as ni la motivation, ni l’envie. Là maintenant, t’as juste envie que le cours se termine. T’as l’impression de perdre ton temps et t’as juste hâte de rentrer chez toi pour te vider la tête, souffler un peu et oublier le bordel qu’est ta vie.

Chez toi. Avant, ça voulait dire la maison familiale où il y avait tout le monde. Ton frère, ta mère et ton père. Mais le divorce a décidé de briser cette organisation, un déménagement étant la suite logique des choses. C’est ton père qui est parti, parce que c’est lui qui a commencé les procédures de séparation. T’as pas eu trop de rancœur, sur le coup. Et t’es pas sûr d’en ressentir aujourd’hui non plus. T’es juste dans l’incompréhension. Le sentiment de rien savoir, d’être impuissant. C’est difficile d’avoir une réaction face au néant. Donc t’es là, au milieu, à suivre le schéma que tes parents ont décidé te concernant. Une semaine chez l’un, la suivante chez l’autre. Et aujourd’hui, c’est le début de celle chez ton père. En plus de ton sac à dos où t’as tes cours, t’as un sac dans tes mains, de quoi te divertir dans cette deuxième résidence. Une dizaine de comics et ton ordinateur, histoire que tu t’ennuies pas quand ton père doit s’absenter. Tu fais le chemin à pied, t’as la flemme de prendre le bus. Au moins, il habite pas trop loin. Peut-être que c’était une volonté de sa part. Pour ne pas qu’il y ait une distance trop grande entre vous. T’entres dans l’immeuble, tu prends l’ascenseur, tu traverses le couleur, t’ouvres la porte. Maintenant, tout est devenu un automatisme. Et c’est pas forcément une bonne chose. Tu poses tes affaires dans ta chambre, tu te sers un bol de céréales et tu t’installes sur la table du salon. De là, tu sors tes devoirs et des papiers parfaitement pliés que tu mets à la place de ton géniteur. Formalité administrative par rapport au lycée. De quoi constituer le comité d’accueil quand ton père rentrera du travail. Quelle surprise.
   

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