BECK ST-CLAIR☽ hands of steel.

Elle replace les plis de sa robe fleurit. Elle a fait une effort, parce qu'elle sait à quel point; maman, elle aime la voir en robe. Sa chevelure est remonté dans un chignon qui laisse apparaître sa nuque. Elle tient entre ces doigts un présent, alors que son corps remonte l'allée de la demeure familiale, la demeure des St-Clair. Elle sourit en entendant les enfants rigoler et rire dans la cours à l'arrière. Les repas du dimanche sont sacrés et toujours extrêmement animés. Elle décide de faire son apparition à l'arrière de la maison, alors que la majorité doivent se trouver dans le jardin, une bière à la main. C'est exactement l'image qu'elle constate en apparaissant et ça lui arrache un sourire doux. « La retardataire préféré!» Que lance son frère, cela la fait rouler des yeux; mais, elle garde le sourire sachant pertinemment qu'il a raison et que la ponctualité n'est pas l'une de ses forces. Elle s'avance vers eux, elle les embrasse chacun; ébouriffe les cheveux d'un de ces neveux qui passent en courant près d'elle, ça grouille de vie. Y'a l'odeur du barbecue qui flotte dans l'air et d'ailleurs y'a le paternel afféré à faire cuire tout ça. Elle dépose le cadeau sur la table mis à disposition et elle va l'embrasser sur la joue, regardant son oeuvre. Ça lui donne l'eau à la bouche tout ça, elle adore les repas du dimanche. « Ton amoureux n'est pas venu?» Qu'il demande sans la regarder, trop absorbé par sa tâche, mais elle sait qu'il écoute attentivement quand même. Rien ne change dans le décor des repas du dimanche, sauf peut-être l'homme avec qui; elle débarque. Ça c'est variable, peut-être trop variable d'ailleurs surtout à l'âge de quarante ans, alors que son frère et sa sœur sont en couple, son frère à déjà trois gosses, sa sœur est enceinte de son deuxième, alors qu'elle, elle a rien de tout ça. Elle est même loin du compte. « Non, il bossait.» Qu'elle explique sans trop élaborer; c'est l'excuse facile, la porte de sortie. Alors, qu'elle n'a pas envie d'expliquer qu'elle a mis un terme à cette relation, parce qu'il était trop parfait pour elle. Beck, elle adore les repas en famille, ce qu'elle apprécie un peu moins c'est lorsque sa famille décide de s'acharner sur son cas créant chez elle, une pression. En même temps, elle peut largement comprendre; la quarantaine maintenant bien installé, il serait peut-être important qu'elle songe un peu à ses projets futurs. Sa mère attend patiemment qu'elle lui présente un bon parti, qu'elle débarque au repas familiaux avec la bague au doigts. Évidemment, l'idée qu'elle puisse lui offrir un petit-fils ou une petite-fille n'est plus quelque chose d'envisageable, madame St-Clair a mis une croix là-dessus, comme Beck d'ailleurs, légèrement à contre-coeur.

Quand elle se retrouve sur scène, elle a l'impression de revivre. Évidemment, elle ne joue pas devant une salle comble, les gens ne chantent pas ses chansons comme elle a longtemps espérée. Toutefois, ils sont là pour l'écouter, du moins la plupart d'entre eux. Beck, elle chante des reprises, elle prend les préférences de la clientèle et elle chante. Tant qu'elle peut avoir un micro entre les mains, tant qu'elle peut chanter des mots, soulager ses maux, y'a que ça qui compte. Sa voix chaude et envoûtante qui enveloppe le resto-bar, les soirs où son patron accepte. À chaque fois, qu'elle chante; elle a l'impression de toucher à son rêve, rêve enfoui, du bout des doigts; juste un peu. Elle devient la star d'un soir avant de retrouver son tablier, son calepin et circuler entre les tables. Elle est un peu comme cendrillon avant le coup de minuit; avant que tout redevienne normal. Quand elle chante, elle ne fait pas seulement revivre, elle ne fait pas seulement survivre, elle vit tout simplement. Talent brute, lorsqu'elle ouvre sa bouche; elle y a longtemps cru, elle a travailler fort pour atteindre ce rêve inaccessible et éphémère, sans jamais vraiment réussir. Du coup, elle se contente de ces soirs; puis elle se perd, elle rêvasse. Mélomane, elle raffole du son brute des vinyles sur son tourne-disque. D'ailleurs, dans son appartement, y'a toujours un fond de musique qui joue. La musique c'est vital à son existence comme de l'oxygène pour respirer. La musique c'est l'exutoire, c'est son amante des jours en couleurs et des nuits plus sombres.